Repenser l’Histoire des Amériques depuis les marges (1)
Le nord de l’Amérique espagnole. Le monde amérindien sous la pression coloniale
(XVIe-XVIIIe siècle)
Au-delà de la vallée centrale de Mexico, cœur de l’empire Aztèque préhispanique, le nord de la vice-royauté de la Nouvelle-Espagne, était perçu par les Espagnols comme un espace de « frontière » dans la mesure où les fronts de guerre avec les sociétés amérindiennes restèrent ouverts pendant toute la période coloniale. En effet, sur cette immense superficie territoriale – qui comprend le sud des Etats-Unis actuels -, la fragmentation, l’instabilité et la discontinuité impériale étaient la norme en raison du manque de moyens du dispositif colonial et des résistances multiformes conditionnées en bonne partie par l’organisation sociopolitique relativement horizontale des amérindiens.
Si toute une lignée historiographique a construit l’histoire et l’identité de ces espaces en termes de marginalité, les études des trois dernières décennies, étayées par les recherches archéologiques et anthropologiques, montrent bien leur centralité dans le champ de l’innovation sociopolitique. D’une part, on y voit se développer les techniques de contrôle des populations propres à la « modernité » occidentale et l’exacerbation de la violence qui les accompagne. D’autre part, les « frontières » ont constitué des espaces d’échanges – souvent déterminés dans la forme et dans le fond par les groupes indigènes -, marqués par une grande porosité et fluidité sociale cristallisées dans des processus de métissage et d’ethnogenèse.
- Enseignant.e: Amaya Cabranes Rubio